Marc Perrenoud (Partie 2): « Ce qui est passionnant, c’est de mesurer la faiblesse économique du web »

Still A-live! Pendant cette période de confinement inédite, l’équipe de Show-me est partie à la rencontre de musiciens et acteurs culturels pour les interroger et prendre le pouls de leur réflexion. Quel est ou que devrait être le statut de l’artiste? Quelles rémunérations possibles? Quelle évolution au sortir de la crise?

 

Marc Perrenoud, pianiste de jazz et co-directeur du festival les Athénéennes

Genève, le 06 avril 2020

« Internet n’est PAS l’épine dorsale de nos sociétés. On s’en rend compte aujourd’hui. C’est une béquille, tout au plus. Le télétravail, les téléconférences, ça emmerde absolument tout le monde. Le virtuel n’a de sens que si le non-virtuel le met en valeur.

Mais ce qui est passionnant, c’est de mesurer la faiblesse économique du web. Les médias par exemple, qui mettent en place de coûteuses plateformes de ventes en ligne de «webjournaux» voient leurs revenus s’effondrer. La musique? Le streaming a achevé le business. Et quelque part c’est beau de s’en rendre compte, «pour de vrai». Priver un musicien de concert le prive de tous ses revenus. Son disque peut faire un carton sur les plateformes 40-50-100’000 écoutes par semaine qui ne rapporteront rien du tout. Juste de quoi se payer l’abonnement Spotify. Alors oui, l’argument de la sacro-sainte promo revient au galop.. Mais il est lassant…Il découle de ces théories du «ruissellement» qui n’ont pas su démontrer leur efficacité. Peut être faudrait-il se détourner quelques peu de ces modèles qui, admettons-le, nous ont tous desservis. Et pour entrer dans la ronde, plutôt que de pleurnicher devant son écran en espérant que tes potes participent à ta levée de fonds de 5000 euros d’un disque que tu ne vendras pas, essaie de poser un pied de l’autre côté du jeu, là où souvent l’amateurisme règne en maître..

Marc Perrenoud

Il est peut-être temps que les directions de festivals se professionnalisent, entendez par là : «c’est pas parce que t’as écouté Kurt Cobain quand t’avais quinze ans, que ton père t’as offert un coffret Miles Davis que t’as écouté deux fois, que t’as servi quelques bières dans un festival et fumé un joint avec un bassiste américain stylé» que tu y comprends quelque chose, à la musique. Oui la musique, car il s’agit bien de cela. Personne ne monterait dans un avion avec que des passionnés d’aviation dans le cockpit, faut aussi un mec qui sait poser le machin de nuit avec un vent de travers…Les musiciens doivent impérativement investir ces positions et participer à cette partie du jeu. Trop de structures, de festivals reposent sur des programmations déconnectées d’une réelle direction artistique. Il ne s’agit pas de gueuler avec une pancarte mais, comme Bruce Lee le ferait: Tu veux te battre contre le système? Deviens le système. T’en a marre des méchants actionnaires? Achète des actions, c’est le moment!  Donc, arrête de bouffer du pain de mie, arrête de sponsoriser tes vidéos dans ta chambrette post-ado et monte un festival, bougre! »

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